Un sujet en émergence
Réalisée sur 32 longs-métrages de fiction issus de la sélection officielle du 77ᵉ festival de Cannes, l’étude montre que les enjeux écologiques commencent à trouver leur place dans les récits, mais souvent de manière périphérique. En effet, alors que 34 % des films mentionnent au moins un enjeu écologique, la moitié de ces mentions sont brèves et ne font pas partie des enjeux principaux. Seuls 3 films se distinguent par leur traitement quasi-parfait sur la question écologique (faible nombre de comportements incompatibles avec l’écologie, valeurs écologiques chez les personnages principaux et représentation notable la biodiversité) : Sauvages de Claude Barras, Savana and the Mountain de Paulo Carneiro et Le Procès du Chien de Laetitia Dosch.
Dans l’étude conjointe sur les César 2025, cette représentation est encore plus faible, bien que les films analysés partagent souvent une typologie similaire et de nombreux titres communs avec Cannes 2024. Selon Charles Menard et Éléonore Gueit, les fondateurs de l’Observatoire des Imaginaires, cette absence d’enjeux environnementaux est "d'autant plus surprenante que les enjeux sociaux, eux, sont très représentés et sous des angles variés." Cela illustre une tension au sein de l’industrie cinématographique : l’écologie est reconnue comme un sujet important, mais elle reste loin d’être un moteur narratif principal. Cette situation pourrait s’expliquer par une volonté d’éviter que le récit soit perçu comme "moralisateur" ou par un manque de connaissances et d’acculturation des scénaristes à l’écologie.
À Cannes en 2024, 26 des 32 films étaient classés dans le genre "drame". Selon Charles et Éléonore, cela pourrait influencer les résultats : "Les films catalogués comme "drame" sont souvent des films plutôt réalistes dans leur dépiction du monde, et qui vont aller creuser des choses difficiles de la nature humaine. Or ces films se prêtent peu à incorporer des représentations proactivement désirable de la transition écologique, sous peine de perdre leur puissance réaliste. Et ce d’autant plus qu’ils ont tendance à dénoncer, voire critiquer, l'objet de leurs représentations. La comédie permet d'apporter un peu plus de fantaisie dans les représentations. Mais c’est l’animation qui aujourd’hui semble être le genre le plus à même de parler d’écologie avec des films forts comme Flow ou Sauvages."